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    Vincent Bontems, La machine respectueuse. L’éthique des techniques de Simondon à l’ère des robots + « L’éthique de la technique chez Simondon et chez Gonseth »

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Vincent Bontems, La machine respectueuse. L’éthique des techniques de Simondon à l’ère des robots + « L’éthique de la technique chez Simondon et chez Gonseth » Empty Vincent Bontems, La machine respectueuse. L’éthique des techniques de Simondon à l’ère des robots + « L’éthique de la technique chez Simondon et chez Gonseth »

    Message par Johnathan R. Razorback Ven 26 Mar - 15:34

    https://www.cairn.info/revue-francaise-d-ethique-appliquee-2018-1-page-22.htm

    "Pour Simondon, les valeurs sont la réalité préindividuelle à partir de laquelle s’individuent les normes métastables de l’éthique [...] Des valeurs donnent naissance à des normes, qui les expriment, mais avec le temps ces normes peuvent devenir conservatrices ou réactionnaires par rapport à ces valeurs, et c’est le « sens de l’axiomatique du devenir qui se conserve d’un état métastable à l’autre » qui donne à la modification des normes le sens d’un progrès. De sorte que la normativité d’un système de normes n’est véritablement éthique que s’il intègre par avance sa propre destruction en tant que système au profit d’un meilleur. ." (pp.5-6)

    "Il y a dès lors trois types de valeur qui peuvent orienter l’action humaine : deux sont relatifs, le troisième absolu. Il y a d’abord les valeurs de la vie, qui découlent de notre condition d’être vivant et qui engendrent la plupart des valeurs polarisantes (bon /mauvais). Il y a ensuite les valeurs techniques, qui sélectionnent ce qui est positif pour un processus constructif, et ne s’oppose donc pas à une contre-valeur, mais seulement à ce qui est indifférent du point de vue technique. Enfin, il y a les valeurs culturelles, qui tentent d’accorder ces deux types de valeur, c’est-à-dire d’offrir des schémas d’action qui concilient les valeurs biologiques et techniques.

    La conscience morale se développe pour résoudre cette tension inhérente aux problèmes éthiques ; elle diffère d’une simple conscience psychologique, parce qu’elle ne juge pas un acte en fonction du contexte immédiat (ce qui serait pure réaction psychologique à la situation), mais aussi en fonction d’une norme éthique qui anticipe culturellement sur les suites de l’acte, sur son amplification. Il ne s’agit pas seulement de la peur du châtiment, ni d’une morale abstraite, ni du respect des traditions, mais de se demander si la répétition et la propagation de l’acte a un sens transductif, s’il s’insère dans un processus qui répond aux valeurs qu’assume le sujet
    ." (p.6)

    "Les trois types d’éthique saisissent chacune un moment de la dynamique éthique. L’existence indispensable des normes pour exprimer les valeurs montre que la déontologie est une composante du référentiel éthique. Mais elle présente de manière inadéquate l’amplification des normes comme une universalisation abstraite. Or, aucune norme n’incarne à elle seule la moralité, aucune ne doit être absolutisée ; la norme est mise en jeu en même temps que l’acte est effectué, car ils sont tous deux évalués en fonction des suites de cet acte. Il y a donc une forme de conséquentialisme au sein de la révision éthique des normes au nom des valeurs. Toutefois cette anticipation des suites de l’acte ne porte pas que sur ses conséquences de l’acte en tant qu’acte individuel isolé, elle est l’anticipation de la normativité culturelle de l’acte. Qui agit éthiquement doit éprouver la solidarité de son acte avec les actions éthiques d’autres sujets. Le critère essentiel immanent à l’acte réside dans l’intégration du sujet au sein de la culture et de la culture dans le sujet ; c’est une perspective qui évoque donc fortement celle de l’éthique des vertus. Mais la transformation la plus fondamentale qu’induit le cadre méta-éthique gonsetho-simondonien, c’est que l’éthique des techniques ne consiste plus à juger les objets techniques comme s’ils étaient des réalités extérieures au devenir humain, qu’elle reconnaît la valeur humaine présente au sein des techniques et porte sur la relation que nous entretenons avec les objets techniques." (p.8 )

    "L’éthique des techniques devrait avoir pour objectif présent de résorber les capacités destructives directes de l’humanité et de corriger celles indirectes de nos technologies de production, non pas en régressant ou en limitant le développement technique, mais au contraire en améliorant les objets techniques de manière à ce qu’il s’intègre plus harmonieusement dans leur environnement naturel, social et artificiel." (p.Cool

    "Simondon plaide pour une éthique du recyclage. Pas seulement au sens du recyclage des déchets, mais dans l’optique d’une critique radicale de la surconsommation capitaliste. Pour produire sans cesse, le système économique produit des objets périssables ou jetables, des objets considérés comme « obsolètes » alors même qu’ils sont encore opératoires. Or, envoyer ainsi à la casse une automobile en bon état de fonctionnement, pour en acquérir une autre dont seule la carrosserie et les sièges sont différents, n’est pas seulement un acte négligent ou stupide, c’est une action mauvaise aux yeux de Simondon : « Lorsqu’un objet se trouve réformé pour obsolescence, c’est une quantité importante de travail humain qui se volatilise sans profit, et qui devient irrécupérable. Il s’agit donc bien ici d’une option éthique vis-à-vis des techniques ». Il oppose à la logique de l’obsolescence l’objectif de mettre en place un recyclage véritable et amplifiant « qui rachète les choses du passé et les régénère, ce qui est bien plus qu’une simple restauration, nécessairement prisonnière des normes appartenant définitivement au passé ». Certains objets techniques pourraient acquérir une seconde existence ou fournir les éléments pour d’autres. En fait, Simondon réclame que nous accordions aux objets techniques qui nous ont servis un peu du respect que nous devons aux vieilles personnes. Ce n’est pas sombrer dans le sentimentalisme, il est normal d’être reconnaissant envers les objets avec lesquels nous avons entretenues de bonnes relations." (p.9)
    -Vincent Bontems, « L’éthique de la technique chez Simondon et chez Gonseth » in Eric EMERY & Lazare BENAROYO, L’Ethique en prise avec la « réalité » et le pragmatisme de Ferdinand Gonseth, Lausanne, Digilex, 2011, p. 53-66.



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