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    Anatol Lieven, Le nouveau nationalisme américain

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Anatol Lieven, Le nouveau nationalisme américain Empty Anatol Lieven, Le nouveau nationalisme américain

    Message par Johnathan R. Razorback Lun 20 Avr - 14:41

    « Une majorité d’Américais [croient] que leur pays consacre 20% de son budget à l’aide internationale […] quand à la vérité elle n’atteint pas 1% et qu’elle est la plus faible du monde développé. » (p.29)

    « Ce que j’ai appelé l’ « antithèse » du nationalisme [civique] américain a des racines ethno-religieuses. Par certains aspects, cette tradition relève de ce qu’on a pu nommer le « nationalisme jacksonien », du nom du président Andrew Jackson (1767-1848). […] Courants qui tendent naturellement à remonter à la surface en temps de crise ou de conflit. » (p.31)

    « Ces peurs contribuent à donner aux nationalistes américains ce côté curieusement aigri, mesquin et défensif. » (p.34)

    « Historiquement parlant, en Europe du moins, le conservatisme radical et le nationalisme ont eu tendance à provenir de classes ou de groupes réellement sur le déclin ou qui se perçoivent comme tels, par suite de changements socio-économiques. » (p.34)

    « Ceux qui partagent de telles croyances sont généralement pleins d’amerturme, sur la défensive et naturellement prêts à partir en guerre contre de nombreuses évolutions du monde contemporain. » (p.35)

    « Mentalité d’assiégé. » (p.37)

    « [Chapitre 3. L’amertume de l’Amérique profonde]
    « Le nationalisme allemand est […] né en grande partie d’un profond sentiment d’infériorité et de vulnérabilité à l’égard de la France. » (p.203)

    « Réactions de peur, d’hostilité, de revendication, d’intransigeance et d’autosatisfaction. » (p.204-205)

    « C’est la culture nationaliste, et non la seule ignorance de la population, qui permet d’expliquer comment l’administration Bush a pu détourner la colère des Américains, après le 11 Septembre 2001, vers des objectifs sans rapport avec l’attaque. » (p.205)

    « Rôle du sentiment de défaite dans la génèse du nationalisme ; celui-ci, en effet, ne résulte pas nécessairement d’une défaite de la nation en tant que telle, mais de classes, de groupes et bien sûr d’individus en son sein. La haine et la peur dirigées vers l’étranger naissent souvent des tensions vécues à l’intérieur. » (p.205)

    « Style et une rhétorique de rupture radicale avec la culture dominante et les supposées élites changeantes. » (p.207)

    « Au milieu du XIXe siècle, le mouvement nativiste des « know nothing » rêvait de revenir à l’Amérique protestante des débuts, débarrassée des catholiques irlandais et du capitalisme émergent. » (p.209)

    « Si le « nationalisme jacksonien » comporte d’autres éléments significatifs, tels que le nativisme, l’anti-élitisme, l’anti-intellectualisme et l’aversion pour le Nord-Est, une forte conscience de l’identité blanche et une violente hostilité envers les autres races en ont été au cœur depuis toujours. » (p.216)

    « Les autres éléments qui ont façonné au cours du temps la tradition populiste-nationaliste en Amérique sont l’expérience sudiste de l’esclavage, les traditions culturelles et historiques propres aux protestants écossais d’Irlande qui dominèrent la frontière sud, ainsi qu’une culture de groupe profondément influencée par le protestantisme évangélique. » (p.218)

    « Pour chaque famille ayant trouvé dans l’Ouest le bonheur et la réussite, il y en avait une autre « convenable mais chancelante, qui laissait derrière elle un siècle de fermes en faillite, de suicides de ses hommes, de tombes d’enfants semées sur la route depuis l’Ohio jusqu’à la Côte, que le malheur avait poussé en vain vers l’Ouest » [Ursula K. Le Guin, « Malheur County », dans The Compass Rose (Grafton Books, Londres, 1984). » (p.230)

    "Les analystes étrangers tout comme les les Américains eux-mêmes ont souvent traité le Sud comme une partie culturellement distincte des États-Unis, sans influence sur l'identité nationale au sens large. Le Sud a en effet un caractère historique et culturel très particulier, qui ne peut cependant pas être isolé de la culture politique générale et du nationalisme américain.

    Le Sud blanc constitue une grande partie des Etats-Unis. [...]

    Selon le recensement de 2002, les onze anciens États confédérés représentaient 30,21 % de la population américaine, le Grand Sud (y compris l'Oklahoma, le Missouri, le Kentucky et la Virginie-Occidentale) 35,44 %. Seuls 19,79 % des habitants de l'ancien Sud confédéré et 18,13 % de ceux du Grand Sud étaient noirs ; 17,91 % et 15,71 % respectivement étaient latinos, asiatiques et amérindiens."

    "Les Blancs du Sud forment plus d’un cinquième de la population totale des Etats-Unis ; une part sinon dominante, du moins potentiellement très puissante. S’agissant du pouvoir politique, la position du Sud (et de l’Ouest, son allié habituel) est renforcée par le système fédéral américain, qui donne aux Etats peu peuplées mais à majorité blanche traditionaliste un poids disproportionné. Depuis les années 1970, seule une poignée d’Etats du Sud ont opté pour le candidat démocrate à l’élection présidentielle." (p.232)

    "Comme Michael Lind, Kevin Phillips, Peter Applebome et d'autres l'ont souligné, au cours des deux dernières décennies, la "sudisation" du parti républicain a conféré à ces traditions une importance aussi nouvelle que considérable dans la politique de l'Amérique dans son ensemble et, par conséquent, dans le comportement international des États-Unis.

    Parmi les effets de cette "sudisation", on peut noter un durcissement du nationalisme. La religiosité croissante des Républicains marqués par le style du Sud a également eu son effet, à la fois en aliénant les Etats-Unis de l'Europe "athée" et en renforçant l'engagement en faveur d'Israël. Cette transformation des Républicains a largement contribué à la polarisation croissante des Américains en fonction des partis politiques. Comme nous l'avons indiqué dans l'introduction, les divisions partisanes reflètent également des attitudes fortement contrastées en matière de religion, de moralité, de culture, d'économie et de nationalisme.

    Cette division a été symbolisée en 2003 par la condamnation publique des démocrates pour décadence morale et manque de patriotisme par leur dernier représentant conservateur du Sud, le sénateur Zell Miller de Géorgie. Ou, comme l'a dit Thomas Schaller en 2003, "Essayer de reconquérir le Sud est un exercice futile et contre-productif parce que le Sud n'est plus la région de l'alternance. Il a basculé : La "stratégie sudiste" de Richard Nixon en 1968 a porté tous ses fruits". Le Sud blanc n'a évidemment pas retrouvé la domination politique dont jouissait l'aristocratie de Virginie des années 1780 aux années 1820, mais il a récupéré et même dépassé le pouvoir exercé par les représentants de la région depuis la fin de la Reconstruction après la guerre civile, à la fin des années 1870, jusqu'à l'ère des droits civiques et l'effondrement de l'allégeance du Sud envers le parti démocrate au milieu des années 1960.

    L'une des principales raisons de la puissance du Sud est la manière dont il a pu exercer une influence politique disproportionnée grâce à son emprise sur l'un des deux grands partis. De 1877 aux années 1960 (bien qu'avec une force décroissante à partir des années 1940), le Sud blanc était solidement démocrate, grâce à l'hostilité amère des Sudistes à l'égard du parti républicain d'Abraham Lincoln. Toutefois, pendant toute cette période, les préjugés persistants du Nord et du Midwest liés à la guerre de Sécession et le malaise suscité par le bilan racial du Sud signifiaient qu'aucun Sudiste des onze États confédérés ne pouvait aspirer à la présidence (à moins que, comme Woodrow Wilson, il n'ait déménagé dans le Nord dans sa jeunesse).

    La majorité du Sud blanc ayant changé d'allégeance pour le parti républicain dans les années 1960 et 1970, en réaction à la promotion des droits civils et du multiculturalisme par les démocrates, son rôle est devenu beaucoup plus militant. L'importance cruciale du Sud blanc pour les espoirs républicains a été démontrée lors d'une série d'élections présidentielles, notamment en 2000, lorsque l'incapacité d'Al Gore à remporter un seul État du Sud (bien qu'il soit lui-même originaire du Tennessee) a réduit à néant ses espoirs présidentiels."

    "Au cours des dernières décennies, des éléments importants de la culture blanche du Sud se sont répandus bien au-delà de leur patrie d'origine : la religion protestante évangélique du Sud, le culte des armes personnelles, la musique country et western et les courses de stock-cars (dont l'origine remonte apparemment aux bootleggers de whisky "moonshine" des Appalaches). Le Sud est également depuis longtemps le foyer d'une forme particulièrement intense de nationalisme américain, fortement marquée par le respect de l'armée et des valeurs militaires, et s'inscrit dans une culture plus large qui croit aux valeurs traditionnelles de la religion, de la famille, de la virilité et de l'honneur.

    Le Sud, dans ce sens culturel, n'a jamais coïncidé avec les onze États qui, en 1861, se sont séparés de l'Union et ont formé pendant quatre ans les États confédérés d'Amérique. Le Grand Sud s'étend au-delà des frontières de l'ancienne Confédération et même de la ligne Mason-Dixon (le parallèle qui séparait les États esclaves des États libres avant 1861) pour couvrir de grandes parties du Midwest et de l'Ouest. Selon certains géographes culturels, la frontière culturelle septentrionale du Grand Sud se situe approximativement le long de la route 40, qui traverse d'est en ouest le centre de l'Ohio, de l'Indiana et de l'Illinois. À l'ouest, le Grand Sud comprend l'Oklahoma et d'autres États largement colonisés par l'ancien Sud. Dans sa course à la présidence, le populiste conservateur radical (et anciennement raciste) George C. Wallace a fait appel aux Sudistes "de Baltimore à Oklahoma City en passant par Saint-Louis".

    Cette région constitue le cœur battant des mouvements protestants évangéliques, ce qu'on surnomme la Bible Belt, et l'image d'une Amérique profondément religieuse provient dans une large mesure du Grand Sud. Jusqu'à une date relativement récente, cette région ne comptait pas de grandes villes et n'a donc pas connu l'immigration massive qui s'est déversée dans les villes du Nord et de l'Est à partir du milieu du dix-neuvième siècle. Dans de nombreuses régions, et surtout dans les campagnes et les petites villes, la population blanche du Grand Sud est restée homogène. W. J. Cash a déclaré que le Sud blanc "n'est pas tout à fait une nation au sein d'une nation, mais c'est ce qui s'en rapproche". Il a écrit ces mots en 1941, mais des décennies plus tard, l'éminent sociologue sudiste John Shelton Reed pouvait encore parler des Blancs du Sud comme d'une ethnie douée de conscience ethnique. Dans ce contexte, il convient de rappeler que si quelques batailles de la guerre de Sécession s'étaient conclues dans l'autre sens -ce qui n'est nullement une impossibilité historique-, le Sud serait en fait devenu une nation indépendante, avec sa propre conscience nationale (blanche).

    D'une part, l'"identité nationale" du Sud était clairement "construite". Elle a d'ailleurs été construite en réponse à une menace particulière : le démantèlement de l' "institution particulière" du Sud, l'esclavage. En outre, même si les Blancs du Sud haïssaient et craignaient sincèrement les Noirs, l'esclavage était une question qui concernait avant tout les élites sudistes propriétaires d'esclaves. Le Sud d'avant-guerre peut donc être considéré comme un bon exemple du modèle de construction élitaire de l'Etat-nation moderne défendu par Eric Hobsbawm et d'autres chercheurs -marqués à gauche- qui interprète le nationalisme dans une perspective "constructiviste".

    D'un autre côté, d'autres problématiques que l'esclavage ont également joué un rôle dans la division Nord-Sud avant 1861. Néanmoins, si l'on retire l'esclavage et l'antiesclavagisme du Nord de l'équation, il n'y a aucune raison de penser que les élites sudistes auraient consacré autant d'efforts à la construction d'une identité distincte, ou que les États du Sud seraient allés jusqu'à se battre pour l'indépendance pendant quatre années de guerres catastrophiques.

    Mais le Sud est aussi un exemple du fait que si les identités nationales peuvent être "construites", elles ne peuvent pas -comme le croyait Hobsbawm- être "inventées". Elles doivent être assemblées, ou "imaginées", à partir de certains éléments préexistants ; et si ces éléments ne sont pas anciens et forts, le nationalisme qui en résultera sera faible et peu de gens seront prêts à se sacrifier et à mourir pour leur nation. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles les nationalismes inventés dans l'Afrique postcoloniale, fondés sur des territoires coloniaux totalement artificiels, se sont généralement révélés si faibles, alors que de nombreuses anciennes loyautés tribales et religieuses se sont avérées si fortes.

    L'identité "proto-nationale" du Sud blanc d'avant-guerre reposait sur trois fondements principaux. Le premier, évidemment, était la détermination des Herrenvolks à maintenir les Noirs dans une position servile et impuissante -ce que Cash a appelé la tradition "dorique" du Sud, en référence à l'ancienne Sparte et sa féroce répression de la population hilote. La seconde, étroitement liée à la première, était le désir de préserver l'économie agraire du Sud et, partant, la domination de la classe des propriétaires de plantations. Ce désir a généré des défenseurs intellectuels et culturels qui se sont tournés consciemment vers les traditions européennes de conservatisme aristocratique, très différentes du type du "conservatisme" libéral prévalant ailleurs aux États-Unis.

    Comme en Europe, plutôt que de défendre explicitement le pouvoir aristocratique, cette tradition s'attaquait à l'absence d'âme, à l'atomisation et à l'exploitation du capitalisme du Nord et l'opposait aux valeurs méridionales, réelles ou inventées, de continuité des traditions et d'enracinement dans le sol. (Ou, pour reprendre les termes de T. R. Fehrenbach à propos des Texans du XXe siècle, "la grande majorité d'entre eux savaient où leurs grands-parents étaient enterrés"). Ce type de critique du capitalisme occidental a été très caractéristique non seulement des ordres sociaux agraires et aristocratiques en déclin, mais aussi des mouvements nationalistes des sociétés totalement ou partiellement "vaincues" tout au long de l'histoire moderne, depuis les idées allemandes de communauté teutonique (Gemeinschaft) contre la "société" française et britannique sans âme et exploiteuse (Gesellschaft) jusqu'aux Slavophiles du XIXe siècle en Russie et à une foule d'écrivains du "tiers-monde" à notre époque. Ainsi, dès 1825, une atmosphère de fierté, de pauvreté et de ressentiment qui, au XXe siècle, a favorisé la croissance du nationalisme arabe et africain, s'était créée au sein de la gentry de Caroline du Sud.

    Cette tendance de l'identité sudiste se superpose à une autre qui a été occultée à la fois par la défaite du Sud lors de la guerre de Sécession en 1865 et par le fait que, pendant cette guerre, les Américains d'origine anglo-saxonne et irlandaise ont combattu dans les deux camps, tout comme les protestants évangéliques : à savoir les éléments spécifiquement ethniques de la tradition du Sud blanc. Je pense que si le Sud blanc avait gagné la guerre de Sécession et s'était établi en tant que nation indépendante, l'affirmation d'une identité ethnique basée sur un mélange de souches anglo-saxonnes et irlandaises écossaises et de protestantisme fondamentaliste serait apparue comme le visage public central du nationalisme sudiste blanc.

    Au fur et à mesure que le Nord, ou les États-Unis restants après la sécession du Sud, devenait de plus en plus ethniquement mixte en raison de l'immigration, la "pureté" de la tradition ethnique du Sud aurait été affirmée [...] En effet, cette opposition pureté/métissage était déjà largement utilisée dans la rhétorique sudiste pendant la guerre civile. Elle était partagée dans une certaine mesure par le Sudiste Woodrow Wilson et a été poursuivie sous une forme enragée par les nativistes antisémites de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, comme le gouverneur Tom Watson de Géorgie.

    Dans cette histoire alternative, le Sud aurait perdu ses derniers libéraux au profit du Nord, mais aurait attiré les Blancs conservateurs du Nord effrayés par la transformation de la nation par l'immigration ; des Blancs tels que le romancier Owen Wister ou le peintre Frederic Remington, avec ses propos féroces sur "les Juifs, les Indiens, les Chinois, les Italiens, les Huns - les ordures de la Terre que je hais". Mais comme l'ont souligné de récents spécialistes de la démographie historique américaine, la tradition ethnique des Écossais et des Irlandais n'était au fond ni construite ni inventée, mais très ancienne, perpétuant jusqu'au XXe siècle des traditions populaires bien antérieures à l'ère moderne et même, dans certains cas, au christianisme.

    En outre, les circonstances violentes dans lesquelles les Écossais irlandais se sont installés à la frontière américaine aux XVIIIe et XIXe siècles reproduisaient à bien des égards les circonstances qu'ils avaient laissées derrière eux, à la fois les guerres sauvages contre les Irlandais gaéliques et la tradition bien plus ancienne des querelles le long de la frontière anglo-écossaise et entre les clans écossais et nord-anglais. Au XIXe siècle, les Écossais irlandais eux-mêmes étaient bien conscients de cette tradition. Andrew Jackson aurait "exigé de ses pupilles qu'ils lisent l'histoire des chefs écossais qu'il admirait profondément et dont il faisait les modèles de ses propres actes"." (pp.105-117 : dans l'édition anglaise)

    « La figure de sir Walter Scott est à cet égard fascinante. L’engouement pour ses romans historiques et ses poèmes dans le Sud d’avant la guerre a généralement été interprété -et moqué- comme participant de la tentative des planteurs de s’inventer pour eux-mêmes une aristocratie britannique et de revendiquer l’ascendance des « Cavaliers ». Pour les Écossais d’Irlande, sur la Frontière, le rôle de ces lectures était assez différent : il s’agissait de « ré-imaginer », sous une forme expurgée et convenable, leur propre tradition historique, et par là, de romanticiser leurs propres vies sur la frontière du Sud, laquelle, comme on l’a vu, reproduisait, par bien des aspects, celle de leurs sauvages ancêtres.

    Si le Sud blanc avait obtenu son indépendance, Scott y serait aujourd’hui étudié sous le même angle que les poètes et romanciers nationalistes du XIXe siècle qui ont contribué à « imaginer leur nation » en faisant de contes et de légendes authentiques mais parcellaires des mythes nationaux -ainsi Elias Lonnrot en Finlande, ou Andrejs Pumpurs en Lettonie. » (p.240)

    "En 1979, j'ai passé plusieurs mois dans une université de la petite ville de Troy, dans le sud de l'Alabama, dans le cadre d'une bourse de l'Union anglophone nommée en l'honneur du gouverneur George C. Wallace, qui allait bientôt prendre sa retraite. À cette époque, non seulement la société était rigidement divisée entre les Noirs et les Blancs, mais la majorité absolument écrasante des Blancs nés dans la région que j'ai rencontrés étaient d'ascendance mixte anglo-saxonne et irlandaise, et de religion baptiste du Sud. Selon une enquête réalisée en 1982, les fidèles du comté de Pike, où se trouve Troy, sont à 67,5 % des baptistes du Sud et à 15,7 % des méthodistes unis. Aucune autre église n'atteignait 5 % du total. Dix-huit ans plus tard, les chiffres pour les baptistes du Sud et les méthodistes étaient presque identiques. [...]

    La grande majorité des étudiants blancs se décrivaient eux-mêmes comme des "rednecks" et en étaient fiers. Ils étaient en effet très éloignés des centres de richesse, de pouvoir, de culture et d'influence américains. Ils le savaient, et la gamme de leurs réactions allait de la fierté piquante au ressentiment amer. Ils possédaient un sens très fort de la communauté ethnoreligieuse et de la tradition locale. Bien que très peu d'entre eux soient d'origine riche ou aristocratique, beaucoup étaient capables de retracer leur ascendance au-delà de la création de l'Alabama, jusqu'aux colons originaires du Tennessee, de la Géorgie ou des Carolines. Étonnamment, certains étaient même fiers de posséder des ancêtres Cherokee ou Creek, car cela constituait la preuve d'une implantation ancienne, alors que les ancêtres noirs, bien que parfois présents, n'étaient absolument pas évoqués. Malgré les programmes d'aide de l'État, une grande partie de la population rurale, tant blanche que noire, était encore terriblement pauvre par rapport aux normes du monde "développé", avec des niveaux d'analphabétisme extrêmement élevés.

    À l'exception du temps passé au service militaire, un nombre tout à fait étonnant de personnes n'avaient jamais quitté l'Alabama, à l'exception de visites à Pensacola et aux plages de la Panhandle de Floride, et d'autres encore n'avaient jamais voyagé en dehors du Sud. Compte tenu des distances plus importantes aux États-Unis qu'en Europe, l'isolement de Troy était, à certains égards, comparable à celui des petites villes européennes avant l'arrivée des chemins de fer.

    Les gens sont extrêmement gentils et accueillants envers les visiteurs individuels (du moins ceux qui viennent de Grande-Bretagne, un pays qui semble jouir d'un prestige quasi mystique, à la fois comme allié en temps de guerre et comme terre d'origine de leurs propres ancêtres), mais beaucoup sont profondément méfiants à l'égard des étrangers en général et ignorent tout de l'Amérique au-delà du Sud inférieur. Le monde au-delà des côtes américaines était une sorte de théâtre d'ombres magique, plein de héros et de démons, mais sans réelle substance. Dans certains cas, le terme "démons" traduit littéralement la façon dont ils voyaient les ennemis de l'Amérique, car les conceptions millénaristes de l'histoire étaient également présentes, même si, bien entendu, elles l'étaient moins à l'université que dans la population environnante.

    Il s'agissait donc d'une société aussi différente de l'image commune de la prospérité américaine et du "melting pot" américain que l'on puisse imaginer ; et cette image se reflétait et se reflète encore dans une large mesure dans les petites villes du Sud profond et dans certaines parties du Texas et de l'Ouest, reflétant ce qu'Oran Smith a appelé "l'incroyable homogénéité des Sudistes blancs". Les Noirs avaient été acceptés à l'université et ne faisaient pas l'objet d'une discrimination manifeste, mais ils se trouvaient toujours dans une position tout à fait subalterne, avec peu d'influence au niveau local.

    Au cours des soixante dernières années, les énormes changements économiques initiés par la Seconde Guerre mondiale ont profondément modifié le Sud. Le transfert des industries de la ceinture de rouille du Nord-Est et du Midwest a transformé certaines parties du Sud en quelques-unes des zones les plus industrialisées d'Amérique, et cette transformation a été largement médiatisée par les promoteurs de la région et d'ailleurs. Le développement économique a attiré de nouveaux immigrants, non seulement des Latinos mais aussi des sud-Asiatiques, de sorte que, pour la première fois depuis l'expulsion des Indiens, la société du Sud n'est pas simplement divisée selon les lignes de démarcation entre Noirs et Blancs.

    Cependant, un coup d'œil sur la carte politique, religieuse et idéologique du Sud blanc révèle une société qui n'a pas changé autant que le suggèrent les chiffres de l'évolution économique. [...] Six Sudistes sur dix déclarent toujours préférer le récit biblique de la création à la théorie de l'évolution (ce chiffre inclut bien sûr les Noirs du Sud).  [...]

    Cette continuité peut s'expliquer par le fait que le Sud est devenu plus homogène au cours du siècle dernier. Avant la guerre civile, les Noirs étaient majoritaires dans deux États du Sud (Caroline du Sud et Louisiane) et très proches de la majorité dans deux autres (Alabama et Mississippi). Dans les années 1960, l'émigration des Noirs vers le Nord, attirés par les emplois du Nord et poussés par l'oppression et le harcèlement des Blancs du Sud, avait radicalement réduit ces chiffres - un changement qui contribue à expliquer pourquoi l'obtention des droits civiques pour les Noirs sous la pression fédérale, malgré la résistance farouche de nombreux Blancs, n'a pas conduit à l'éruption de violence de masse [...] comme les racistes et les conservateurs du Sud l'avaient si souvent redoutés." (pp.105-117 : dans l'édition anglaise)

    « Selon le rencensement de 1880 les Noirs atteignaient 41% de la population du Vieux Sud. Dans les années 1960, ce chiffre s’était réduit de plus de la moitié. » (p.244)

    "Les pertes subies par le Sud pendant la guerre de Sécession sont tout à fait comparables à celles subies par les nations européennes pendant les grandes guerres du XXe siècle. Quelque 260 000 soldats confédérés, soit plus d'un cinquième de la population masculine blanche adulte, ont été tués au combat ou sont morts de maladie (quelque 350 000 soldats de l'Union sont morts, mais sur une population beaucoup plus nombreuse). Des centaines de milliers de civils, Blancs et Noirs, sont également morts de maladies dues à la malnutrition. Plusieurs des plus grandes villes du Sud furent détruites, ainsi que de nombreuses villes plus petites, et de vastes étendues de campagne furent délibérément saccagées par la stratégie de Sherman, Sheridan et d'autres généraux du Nord. La valeur réelle de tous les biens a chuté de 33 %, le nombre de chevaux de 29 % et le nombre de porcs de 35 %. La production de coton du Sud n'a retrouvé son niveau d'avant-guerre qu'en 1879, quatorze ans après la fin de la guerre. En outre, comme dans tant d'économies néocoloniales de monoculture dans le monde, l'économie du Sud dans son ensemble a été déprimée par une chute du prix du coton qui a duré plusieurs décennies, tout comme l'économie des Grandes Plaines a été déprimée par une chute du prix du blé.

    Il a fallu plus d'un siècle pour que certaines parties du Sud confédéré rattrapent le reste de l'Amérique, tant en termes de revenus et de développement que d'accès au pouvoir politique suprême. De vastes régions ne l'ont pas encore fait, car une grande partie de la campagne et des petites villes du Sud n'a pas encore participé à la modernité étincelante d'Atlanta ou de Huntsville. Pendant un siècle, le Sud a été réduit, dans la réalité et plus encore dans la perception de ses habitants, à une position de dépendance quasi coloniale à l'égard du Nord et de la côte Est, symbolisée surtout par des tarifs de fret ferroviaire discriminatoires à l'égard du Sud et en faveur du Nord-Est - une injustice flagrante qui n'a été corrigée qu'au cours de la Seconde Guerre mondiale. En outre, la période de la Reconstruction radicale sous le régime militaire dans le Sud, avec l'instauration du droit de vote des Noirs et leur accession à des fonctions politiques, a été un choc terrible pour le Sud blanc. La "légende tragique de la Reconstruction", centrée sur les crimes, la corruption et la "tyrannie" des Noirs, a été immensément exagérée et brodée dans la propagande sudiste ultérieure (la plus célèbre étant le roman de Thomas Dixon, The Clansman, et le film Naissance d'une nation, qui s'en inspire).

    [...] Le sentiment d'exploitation économique s'est accompagné d'un amer ressentiment à l'égard de la condescendance et des insultes culturelles, axé principalement, mais pas exclusivement, sur la critique des antécédents et des habitudes raciales du Sud. Ce ressentiment persiste, bien qu'aujourd'hui, plutôt que de parler de race, il s'agisse d'un mépris général du Sud par les progressistes, les intellectuels et les cinéastes de la côte est et de la Californie. Ces moqueries se sont produites de manière continue -bien qu'à des niveaux d'intensité variables- depuis les années 1830, avec un nouveau crescendo atteint dans les années 1960.

    Un siècle plus tôt, à l'approche de la guerre de Sécession, un partisan nordiste d'Abraham Lincoln avait qualifié le Sud de "partie la plus pauvre, la plus mesquine, la moins productive et la plus misérable de la création, et qui devrait donc être continuellement taquinée, raillée, réprouvée et injuriée". Le grand satiriste H. L. Mencken prenait beaucoup de plaisir à dénoncer la barbarie, l'ignorance et la fatuité du Sud, la religion fondamentaliste faisant l'objet des coups les plus tranchants. Même lorsqu'elles sont fondées sur des faits, ces attitudes ne sont pas de nature à susciter de bons sentiments.

    À Troy, certaines de mes connaissances se plaignaient amèrement que chaque personnage sudiste d'un film hollywoodien était susceptible d'être une variante d'une demi-douzaine de clichés traditionnels et hostiles : le chef de police sadique, le "cracker" bestial vivant dans les marais, le prédicateur fanatique et/ou hypocrite, le chef politique corrompu ou, dans le meilleur des cas, le péquenaud ringard et simple d'esprit et la dame aristocratique excentrique sur sa plantation gothique en décomposition.

    Cette expérience régionale collective de défaite et d'humiliation globales est inhabituelle dans l'histoire de l'Amérique blanche, caractérisée par un succès national continu. Pour reprendre les termes de Richard Weaver, "le Sud est la région [américaine] qui s'est faite passée dessus par l'histoire". Tout aussi unique est le sentiment de culpabilité pour les crimes collectifs passés, l'esclavage et le racisme, ressenti par les Sudistes plus libéraux, y compris ceux comme William Faulkner, dont la fierté de leur tradition régionale était fondamentale pour leur identité et leur culture. L'anxiété psychologique et culturelle qui en découle est comparable à la position des nobles russes occidentalisés, humanistes et patriotes, propriétaires de serfs au XIXe siècle. [...]

    La glorieuse lutte militaire de la Confédération contre des forces écrasantes fut très vite réincorporée dans la légende militaire des États-Unis dans son ensemble : un processus symbolisé par des réunions conjointes d'anciens combattants de l'Union et de la Confédération ; par l'enrôlement massif de Sudistes pour la guerre de 1898."(pp.105-117 : dans l'édition anglaise)

    « Ayant renoncé à son rêve d’indépendance, il répondait à la condescendance du Nord par une surenchère nationaliste, et en particulier en surclassant les Yankees décadents et lâches dans leur empressement à combattre pour l’Amérique. On peut voir là un retour à des modèles d’avant la Guerre civile, à une époque où les gens du Sud étaient les plus ardents défenseurs de l’expansion impériale des Etats-Unis.
    Dans le même temps pourtant, d’autres Américains commençaient à célébrer le Sud précisément parce qu’il avait été vaincu : une sorte de symboles de l’honneur et de la tradition pour ceux qui, de toutes les façons possibles, se sentaient aliénés ou mis en échec par les valeurs dominantes de l’Amérique bourgeoise. On pourrait parler d’une tendance « Henry Adams en Harley Davidson », fortement teintée du romantisme inhérent à la « cause perdue ». » (p.250)

    "D'un côté, on trouve les Yankees et d'autres personnes qui ont réagi contre la cupidité, la corruption, la vulgarité, le matérialisme et l'autosatisfaction de l'"âge doré" de l'après-guerre civile et qui ont continué à réagir contre ces caractéristiques de la vie américaine jusqu'à aujourd'hui. Ce faisant, certains ont redécouvert la critique conservatrice et aristocratique du capitalisme, développée dans le cadre des défenses intellectuelles et culturelles du Sud par des écrivains comme George Fitzhugh avant la guerre civile et perpétuée par des intellectuels sudistes comme Allen Tate au milieu du vingtième siècle et, dans une certaine mesure, par Eugene Genovese et d'autres à notre époque.

    À l'autre extrémité du spectre social et intellectuel, comme l'a noté John Sheldon Reed, pour de nombreux Sudistes et autres, les symboles confédérés en sont venus à représenter une version de l'attitude libérale radicale "Don't Tread on Me" ("Ne me marchez pas dessus") : "Vers le milieu du siècle dernier [c'est-à-dire le vingtième siècle], le drapeau confédéré a pris une autre signification : Surtout dans le Sud, mais pas seulement, il a commencé à envoyer un message de défi généralisé à l'autorité et, dans une certaine mesure, à la respectabilité. Les personnes qui l'utilisent de cette manière ne se soucient peut-être pas des Noirs ou des Yankees, mais ces groupes se situent quelque part derrière les proviseurs de lycée sur leur liste de cibles.... Comme l'a dit une jeune fille, "quand je vois le drapeau confédéré, je pense à un pick-up avec un râtelier à fusils et un autocollant sur le pare-chocs qui dit "Je ne freine pas pour les petits animaux".

    L'adoption du symbolisme confédéré par les membres aliénés de la classe ouvrière blanche du Nord (y compris de nombreux Irlandais, Polonais et autres personnes n'appartenant pas à l'ancien noyau ethnique blanc) reflète trois éléments de la tradition confédérée. Le premier est bien sûr la suprématie raciale des Blancs. Les autres sont plus attrayants. Le premier est la tradition "Good Ole Boy" ou redneck sudiste décrite plus haut et célébrée, par exemple, par la populaire série télévisée The Dukes of Hazzard (1979-1985). Il s'agit d'une tradition qui exerce un attrait inné sur tous les "hell-raisers", et qui est honorée par l'étiquette confédérée "Rebel", comme dans le choix du nom du whisky Bourbon "Rebel Yell".

    Un autre aspect de la culture sudiste, qui s'est répandu dans les classes populaires américaines et a fortement nourri le nationalisme américain, est l'image du stoïcisme, de la ténacité et de la bravoure des soldats confédérés de la guerre de Sécession face à une adversité écrasante.

    Cette image est d'une grande force émotionnelle pour de nombreux Américains blancs qui se sentent vaincus par des circonstances économiques et autres indépendantes de leur volonté et exclus de la richesse, du pouvoir, de l'influence et de la mode. Et, bien sûr, ceux qui se sentent vaincus sont aussi, par instinct, par culture et par tradition, des nationalistes américains. Lorsqu'ils se sont sentis abandonnés par leurs dirigeants et leurs généraux pendant et après le Viêt Nam, ils ont écouté les ballades de Bruce Springsteen ou de Johnny Cash sur le patriotisme trahi de la classe ouvrière, et non les hymnes de protestation de Don McLean ou de Bob Dylan. Ces personnes ont donc besoin d'un symbole qui soit contestataire tout en faisant partie de la tradition nationale et surtout militaire américaine.

    "Mes connaissances à Troy, bien que majoritairement d'origine confédérée et très fières de l'être, avaient, dans les années 1970, beaucoup évolué vers [une] identité et [es] sentiment plus larges. Ils nourrissaient encore certains vieux préjugés sudistes à l'encontre des Yankees en général, mais ceux-ci étaient devenus une sorte de plaisanterie avouée, bien qu'elle ait gardé une saveur amère. Leur aversion la plus intense et la plus vive est devenue plus générique, du type "Heartland" : des "élites de la côte Est" et des intellectuels antipatriotiques en général ; des "États des fruits et des noix" de Californie et de Floride (sud), et des modes de vie homosexuels et hippies qu'ils sont censés représenter ; et de la ville de New York, dont on espère souvent qu'elle sera remorquée en mer et engloutie. La distance culturelle, religieuse, ethnique, économique, historique et géographique fait qu'ils ne considèrent les habitants de New York que dans une très faible mesure comme des compatriotes.

    En raison de la crise des otages iraniens [en 1979-1981], les habitants de Troy étaient plus que jamais d'humeur nationaliste, et les "Iraniens" avaient rejoint la galerie existante des figures de la haine internationale. Cependant, signe de ce qui allait s'avérer des confusions extrêmement dangereuses après le 11 septembre, le mot couramment utilisé pour "Iranien" était "Arabe"." (pp.105-117 : dans l'édition anglaise)

    « Dans la plupart des pays, le penchant à l’autoritarisme et l’importance du chef semblent inhérents à ce type de tendance nationaliste. » (p.254)

    « Tout au long de l’histoire américaine, ces tendances à l’autoritarisme ont pris, la plupart du temps, une forme qu’on pourrait qualifier de civique ; elles ont de plus été énoncées, et même conçues en termes de défense du système démocratique libéral américain, et non comme une révolte contre celui-ci. » (p.255)

    « L’idée de volonté générale, telle qu’elle est formulée par Rousseau, peut donc être vue comme une tentative d’étendre à la vie d’une nation entière le modèle, puissant et admirable, mais baignant aussi dans une atmosphère parfois étouffante et répressive, d’une petite ville culturellement homogène. » (p.256)

    [4. Les fondamentalistes et la peur]
    « Comme l’a observé Samuel Huntington : « Plus un pays est religieux, plus il tend à être nationaliste ». » (p.277)

    « Les origines du fort courant d’anti-intellectualisme [au sein du nationalisme populiste] au sein de ce mouvement doivent beaucoup à la fusion d’une hostilité de classe envers les élites instruites et des peurs culturelles et religieuses suscitées par leur supposée culture de l’athéisme. » (p.294)

    « Cet appel rhétorique aux masses contre les élites traîtresses et les intellectuels est évidemment une caractéristique des mouvements nationalistes radicaux depuis leur origine. » (p.295)

    « Dans un sondage réalisé en 1998, 56% des Américains déclaraient qu’ils ne voteraient pas pour un président athée (certes un changement par rapport à 1958, où ils étaient 82% à penser la même chose). » (p.305-306)

    « Le modèle d’une société conservatrice en bonne santé est à chercher dans le passé. » (p.309)

    « [Norman] Cohn et ses collègues semblent pourtant ne pas avoir remarqué, tandis qu’ils analysaient des cultes vieux de cinq cent ans, que des groupes millénaristes, incarnant la même tradition, étaient encore vivants dans l’Amérique d’aujourd’hui, où il existe également une très forte corrélation entre de telles croyances et la pauvreté, la résidence en milieu rural ou en petite agglomération et surtout le manque d’instruction. […] Ressentiment des classes inférieures contre les élites en général, notamment celles qui sont assimilées à une origine « étrangère », les banquiers, par exemple. » (p.317)
    -Anatol Lieven, Le nouveau nationalisme américain, Gallimard, 2005 (2004 pour la première édition états-unienne), 489 pages.

    « Nous nous vantons d’être un peuple chrétien, de placer la morale au centre de notre civilisation […]. L’Europe, complètement abrutie d’alcool, fléau plus terrible que la guerre, la famine et la peste, nous envoie ses distillateurs, ses fabricants d’ivrognes et ses ivrognes, ou même ses buveurs quotidiens, apparemment plus sobres, avec toutes leurs idées antiaméricaines sur la morale et sur le gouvernement ; ils sont absorbés par notre vie nationale, mais ils ne sont pas assimilés ; ils ne savaient pas ce qu’était la liberté quand ils sont arrivés et ils veulent, chez nous, jouir d’une liberté sans limite, permettre ce que nous abhorrons […]. Ils dominent nos sabbats, et nous imposent leurs normes morales, qui sont scandaleusement immorales ; ils gouvernent nos grandes villes […] et les étrangers, pour nous conquérir, n’auront plus qu’à finir le travail en envoyant leurs armées et leurs flottes. »
    -Alphonse Ava Hopkins.





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    « La question n’est pas de constater que les gens vivent plus ou moins pauvrement, mais toujours d’une manière qui leur échappe. » -Guy Debord, Critique de la séparation (1961).

    « Rien de grand ne s’est jamais accompli dans le monde sans passion. » -Hegel, La Raison dans l'Histoire.

    « Mais parfois le plus clair regard aime aussi l’ombre. » -Friedrich Hölderlin, "Pain et Vin".


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