http://www.comite-valmy.org/spip.php?article5447
http://projet.pcf.fr/69844
"Si les prolétaires n’ont pas de patrie et restent internationalistes selon l’héritage marxiste, il n’en demeure pas moins que la culture nationale de l’école républicaine irrigue la société et la culture des militants de la SFIC (section française de l’Internationale communiste) puis du PCF : d’ailleurs le passage d’une dénomination à l’autre souligne bien cette logique identificatrice. Le Parti communiste revendique alors son caractère national au cours des années trente, lorsqu’il propose le rapprochement avec les autres forces démocratiques contre le danger fasciste. L’onde de choc de l’arrivée d’Hitler au pouvoir, mais également les enjeux de la crise économique, sociale et politique des années trente – avec les événements du 6 février 1934 – ancrent définitivement ce rapport à la nation qui est interprété comme l’héritage de la grande Révolution de 1789 et d’une République en danger.
Le front populaire
Le Front populaire permet non seulement d’associer le drapeau bleu-blanc-rouge au drapeau rouge, La Marseillaise à L’Internationale, mais il offre aussi la possibilité d’une implantation nationale plus importante, tant d’un point de vue électoral que militant. Généralement, on retient la poussée communiste aux élections législatives de 1936 avec 72 députés – c’est-à-dire représentants de la nation – mais il ne faut pas oublier dans ce schéma les élus locaux (maires, conseillers municipaux et conseillers généraux) qui incarnent aussi la « petite patrie » dans la « grande patrie ».
Véritable laboratoire, ce moment du Front populaire est celui de la rencontre du PCF avec la nation. Un tel rapprochement culturel peut se voir dans le film réalisé par Jean Renoir La vie est à nous où, dès les premières scènes, l’instituteur présente la France comme « un des pays les plus riches et les plus beaux du monde » faisant l’inventaire des richesses patrimoniales héritées de l’histoire nationale. Cette lecture s’inscrit dans l’idéal républicain, celui du roman national où le peuple est mis à l’honneur au sein des publications du Parti (tant nationales que régionales ou locales). Les reportages de la presse (L’Humanité, La Terre, Regard), mais aussi le congrès d’Arles fin décembre 1937 participent à cet élan. On insiste avec force sur le dévouement patriotique du Parti comme l’illustre le documentaire réalisé pour ce congrès par Jacques Becker La grande espérance : la défense du patrimoine national et des cultures régionales sont au cœur des préoccupations communistes. Cette lecture renoue alors avec la geste de la Révolution française dont le 150e anniversaire en 1939 est dignement célébré. Toutefois, l’entrée en guerre et la signature du pacte germano-soviétique bouleversent quelque peu cet élan. Si les députés communistes votent les crédits de guerre, très vite la diplomatie soviétique reprend le dessus, révélant de fait des contradictions que certains ne surmontent pas et quittent le parti.
Une guerre patriotique
Certes, en juin 1941 après l’attaque de l’URSS par les troupes hitlériennes, la guerre devient « patriotique ». La Résistance communiste qui s’est affirmée auparavant reprend alors la matrice nationale du Front populaire. Le sacrifice de ses martyrs en devient un symbole au moment de la Libération et de l’immédiat après-guerre. Même la Guerre froide, qui rejette à nouveau le PCF, devenu premier parti de France comme « parti de l’étranger », n’annihile pas cet élan. Annie Kriegel évoque même avec une certaine ironie (ou provocation) l’idée d’un « national-thorézisme » (le « national-socialisme » est encore présent dans les mémoires…). Plus que jamais face au danger américain, le PCF joue la carte nationale sur des registres variés, comme celui de la défense de la boisson nationale, le vin, face au Coca-Cola.
Ainsi la culture politique du PCF est marquée par l’horizon national. Certes, il faut composer avec la patrie du socialisme réel, l’URSS, les démocraties populaires, mais ce rapport à la nation est primordial pour comprendre l’action militante, la pratique politique des communistes."
-Jean Vigreux, "Le Parti communiste français et la Nation", 23 avril 2015, La revue du projet: http://projet.pcf.fr/69844
http://projet.pcf.fr/69844
"Si les prolétaires n’ont pas de patrie et restent internationalistes selon l’héritage marxiste, il n’en demeure pas moins que la culture nationale de l’école républicaine irrigue la société et la culture des militants de la SFIC (section française de l’Internationale communiste) puis du PCF : d’ailleurs le passage d’une dénomination à l’autre souligne bien cette logique identificatrice. Le Parti communiste revendique alors son caractère national au cours des années trente, lorsqu’il propose le rapprochement avec les autres forces démocratiques contre le danger fasciste. L’onde de choc de l’arrivée d’Hitler au pouvoir, mais également les enjeux de la crise économique, sociale et politique des années trente – avec les événements du 6 février 1934 – ancrent définitivement ce rapport à la nation qui est interprété comme l’héritage de la grande Révolution de 1789 et d’une République en danger.
Le front populaire
Le Front populaire permet non seulement d’associer le drapeau bleu-blanc-rouge au drapeau rouge, La Marseillaise à L’Internationale, mais il offre aussi la possibilité d’une implantation nationale plus importante, tant d’un point de vue électoral que militant. Généralement, on retient la poussée communiste aux élections législatives de 1936 avec 72 députés – c’est-à-dire représentants de la nation – mais il ne faut pas oublier dans ce schéma les élus locaux (maires, conseillers municipaux et conseillers généraux) qui incarnent aussi la « petite patrie » dans la « grande patrie ».
Véritable laboratoire, ce moment du Front populaire est celui de la rencontre du PCF avec la nation. Un tel rapprochement culturel peut se voir dans le film réalisé par Jean Renoir La vie est à nous où, dès les premières scènes, l’instituteur présente la France comme « un des pays les plus riches et les plus beaux du monde » faisant l’inventaire des richesses patrimoniales héritées de l’histoire nationale. Cette lecture s’inscrit dans l’idéal républicain, celui du roman national où le peuple est mis à l’honneur au sein des publications du Parti (tant nationales que régionales ou locales). Les reportages de la presse (L’Humanité, La Terre, Regard), mais aussi le congrès d’Arles fin décembre 1937 participent à cet élan. On insiste avec force sur le dévouement patriotique du Parti comme l’illustre le documentaire réalisé pour ce congrès par Jacques Becker La grande espérance : la défense du patrimoine national et des cultures régionales sont au cœur des préoccupations communistes. Cette lecture renoue alors avec la geste de la Révolution française dont le 150e anniversaire en 1939 est dignement célébré. Toutefois, l’entrée en guerre et la signature du pacte germano-soviétique bouleversent quelque peu cet élan. Si les députés communistes votent les crédits de guerre, très vite la diplomatie soviétique reprend le dessus, révélant de fait des contradictions que certains ne surmontent pas et quittent le parti.
Une guerre patriotique
Certes, en juin 1941 après l’attaque de l’URSS par les troupes hitlériennes, la guerre devient « patriotique ». La Résistance communiste qui s’est affirmée auparavant reprend alors la matrice nationale du Front populaire. Le sacrifice de ses martyrs en devient un symbole au moment de la Libération et de l’immédiat après-guerre. Même la Guerre froide, qui rejette à nouveau le PCF, devenu premier parti de France comme « parti de l’étranger », n’annihile pas cet élan. Annie Kriegel évoque même avec une certaine ironie (ou provocation) l’idée d’un « national-thorézisme » (le « national-socialisme » est encore présent dans les mémoires…). Plus que jamais face au danger américain, le PCF joue la carte nationale sur des registres variés, comme celui de la défense de la boisson nationale, le vin, face au Coca-Cola.
Ainsi la culture politique du PCF est marquée par l’horizon national. Certes, il faut composer avec la patrie du socialisme réel, l’URSS, les démocraties populaires, mais ce rapport à la nation est primordial pour comprendre l’action militante, la pratique politique des communistes."
-Jean Vigreux, "Le Parti communiste français et la Nation", 23 avril 2015, La revue du projet: http://projet.pcf.fr/69844