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    Pierre Cosme, Auguste

    Johnathan R. Razorback
    Johnathan R. Razorback
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    Date d'inscription : 12/08/2013
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    pierre - Pierre Cosme, Auguste Empty Pierre Cosme, Auguste

    Message par Johnathan R. Razorback Mer 18 Nov - 18:41

    "Alors que, pendant la guerre de Sicile, la Ville et toute l'Etrurie avaient été au bord de la révolte, nécessitant l'envoi en mission de Mécène, la nouvelle de la victoire de Nauloque y fut accueillie avec des transports d'allégresse par une population qui voyait s'éloignait le spectre de la disette et des exactions fiscales. La fin de la guerre contre Sextus Pompée permit en effet à Octavien d'accorder de substantielles remises d'impôts et de dettes. Le sénat et les comices votèrent une série d'hommages au triumvir: un siège d'honneur dans les assemblées, un arc de triomphe, une colonne portant sa statue en or et les rostres des navires ennemis, une inscription célébrant le rétablissement de l'ordre sur terre et sur mer, le droit d'entrer dans l'Urbs à cheval qu'il avait déjà reçu après la paix de Brindes, celui de porter en permanence une couronne de laurier, la célébration du jour anniversaire de la victoire par des actions de grâces et un banquet dans le temple de Jupiter sur le Capitole avec Livie et ses enfants. A l'arrivée d'Octavien à Rome, une foule enthousiaste qui comprenait aussi bien des sénateurs que de simples plébéiens se porta à sa rencontre pour l'accompagner jusqu'à sa maison du Palatin. A la différence de César, son fils adoptif manifesta un profond respect des traditions en s'adressant au peuple à l'extérieur du pomerium pour lui rendre compte de ses actes et en déclinant certains des honneurs qui lui avaient été décernés. Mais il accepta l'ovatio, c'est-à-dire une forme atténuée du triomphe, qui l'autorisa à faire son entrée dans la Ville à cheval le 13 novembre 36. Il ne pouvait pas célébrer le triomphe traditionnel dans la mesure où il n'avait pas combattu un ennemi étranger au terme d'une guerre déclarée selon les règles habituelles. Il accepta aussi que sa personne fût décrétée inviolable comme celle des tribuns de la plèbe, mais refusa que Lépide fût destitué du grand pontificat en sa faveur. En dehors de ces honneurs institutionnels, la popularité d'Octavien également par la ferveur de nombreuses cités italiennes qui commencèrent à placer sa statue dans leurs temples, à côté de celles des dieux. Alors qu'il avait fait, lui-même ou par l'intermédiaire de prête-noms, l'acquisition de plusieurs terrains sur le Palatin pour agrandir sa résidence, il accepta également que le sénat et le peuple romain y fissent construire une maison aux frais de l'Etat. Celle-ci se trouvait donc située -de façon très symbolique- à proximité de l'emplacement présumé de la cabane de Romulus, fondateur de l'Urbs. Quand une partie de cette demeure fut frappé par la foudre, Octavien put la consacrer à Apollon en entreprenant la construction d'un temple. Il commençait ainsi à manifester une dévotion particulière à ce dieu, qu'il ne cessa d'affirmer ensuite." (pp.85-87)

    "Octavien n'oublia pas non plus de récompenser ses partisans. Agrippa reçut une couronne navale en or et Marcus Valerius Messala Corvinus, définitivement rallié à Octavien [après avoir servi Pompée et Antoine], fut coopté dans le collège des augures." (pp.87)

    "
    (p.89)

    "Quand la nouvelle de l'élimination de Sextus Pompée parvint à Rome, elle fut célébrée avec éclat par Octavien qui organisa des jeux dans le Cirque Maxime. Il tint à honorer tout particulièrement son beau-frère en lui élevant des statues dans le temple de la Concorde où Marc Antoine et sa famille reçurent le droit de donner des banquets." (p.91)

    "A l'été 35, flanqué d'Agrippa, il rejoignit son armée rassemblée à Tergeste et prit la route des Alpes dinariques au sud-est. En chemin, il obtint la soumission d'une partie des Iapydes. Pour opérer en terrain montagneux, il divisa ses troupes en plusieurs colonnes et se lança lui-même à l'assaut de l'oppidium de Metulum. Pour la première fois, il semble avoir payé de sa personne en montant en première ligne et fut blessé à une jambe et aux bras en tentant de passer d'une tour d'assaut à l'enceinte ennemie. C'était son premier acte de bravoure militaire: à vingt-huit ans, il était grand temps." (p.93)

    "[En cette même année 34], Caius Sosius [...] célébra son triomphe. L'activité édilitaire était devenue un moyen d'affirmation privilégiée des imperatores. [...] Caius Sosius, lui, n'hésita pas à dédier un temple à Appollon." (p.95)

    "En matière de police urbaine, l'édile [Agrippa] expulsa de Rome les astrologues et les magiciens. Souvent venus d'Orient, ces personnages voyaient leur audience augmenter dans toutes les catégories de la population, sapaient les fondements de la religion romaine traditionnelle et pouvaient représenter une cinquième colonne soutenant les intérêts de Marc Antoine.
    L'année 33 était en effet cruciale: les pouvoirs triumviraux, renouvelés à Tarente pour cinq ans en 37, arrivaient en effet à leur terme à la fin de celle-ci. Octavien occupait alors une position stratégique: il était consul pour la seconde fois. Certes, l'importance de cette magistrature s'était amoindrie depuis que la réalité du pouvoir était accaparée par les triumvirs qui avaient établis à l'avance la liste des titulaires au profit des partisans de chacun d'entre eux. D'ailleurs, depuis l'époque de César, les consuls ordinaires -entrés en charge le 1er janvier- laissaient généralement place au bout de quelques mois à des consuls appelés suffects. Cette année-là, ces consuls suffects furent particulièrement nombreux: on en compta sept et tous partisans d'Octavien. Mais c'est Marc Antoine qui paraissait encore détenir l'avantage sur son collègue
    ." (pp.96-97)

    "Ceux qui pouvaient être les moins réceptifs aux arguments patriotiques des partisans d'Octavien étaient aussi ceux auxquels de nouvelles conquêtes en Orient, sous la conduite du fils adoptif de César, offraient le plus de perspectives d'enrichissement. L'intérêt bien compris de la plupart des sénateurs restés en Italie les incitait donc à le suivre lui plutôt que Marc Antoine dont la victoire risquait de diviser définitivement en deux l'Empire romain et priver l'Italie des revenus qu'elle pourrait tirer de l'exploitation de l'Orient. Dans un premier temps cependant, pour financer ses préparatifs militaires, Octavien dut de nouveau accroître la pression fiscale et recourir parfois à la force pour prélever les fonds dont il avait besoin. Pour justifier de telles mesures, il lui était donc indispensable de ne pas apparaître comme celui qui prenait l'initiative de rallumer les guerres civiles, mais au contraire comme le rempart de l'Italie agressée par un ennemi extérieur. C'est la raison pour laquelle il prit soin de déclarer la guerre à la seule reine d'Egypte en ressuscitant pour la circonstance la procédure ancestrale que les Romains des temps anciens observaient quand ils affrontaient leurs voisins italiens. On le vit ainsi se rendre au temple de Bellone -la déesse de la guerre- pour y procéder lui-même aux rites traditionnels des féciaux. Ce collège de vingt prêtres -dont on attribuait la paternité au roi Numa Pompilius- était chargé d'aller réclamer réparation à un adversaire de Rome, en cas de litige. Si cette négociation échouait, le chef de la délégation des féciaux déclarait la guerre en projetant une lance ensanglantée en territoire ennemi. Au détail près qu'Octavien avait adapté le rituel des féciaux en négligeant d'aller négocier à Alexandrie, les formes requises pour que cette guerre fût considérée comme juste avaient été respectées. Il se garde bien de déclarer Marc Antoine ennemi public, mais se contenta de le destituer du consulat pour l'année 31, qui fut attribué à Marcus Valerius Messala Corvinus. C'était Marc Antoine qui se mettrait lui-même hors la loi s'il restait aux côtés de Cléopâtre.
    A l'automne 32, cette procédure extrêmement formelle trouva un prolongement plus politique dans le serment de fidélité qu'Octavien reçut de l'Italie, mais aussi de l'Occident romain. Il s'agissait là du résultat d'un mouvement d'opinion, en grande partie orchestré par les partisans d'Octavien durant l'été précédent.
    " (pp.101-102)

    "Octavien pouvait aligner quatre cents navires de guerre, environ soixante-dix mille légionnaires, dix mille fantassins alliés et douze mille cavaliers. Une force terrestre équivalente avait été laissé en arrière pour contrôler l'Occident. [...]
    Marc Antoine se trouvait alors probablement à la tête de cinq cent navires de combat -auxquels il faut peut-être ajouter deux cents navires égyptiens- soutenus par environ trois cents bateaux de transports, de soixante-quinze mille légionnaires et de vingt-cinq mille auxiliaires fournis par les peuples alliés. [...] Chaque camp avait atteint les limites de ses capacités de mobilisation
    ." (pp.130-104)

    "Le 12 août, quand Octavien reçut, par l'intermédiaire d'Epaphrodite, un billet dans lequel Cléopâtre demandait à être enterrée auprès de Marc Antoine, il était trop tard. On retrouva la reine morte, revêtue d'une robe somptueuse et de tous les insignes royaux, avec deux suivantes qui l'avaient accompagnée jusque dans la mort. [...] Octavien dut se résoudre à se passer de l'exhibition de la reine d'Egypte à son triomphe. Il n'est pas sûr qu'il ait tant regretté cette issue." (p.116)

    "Ptolémée Césarion, le prétendu fils de César et de l'Egyptienne, représentait une menace potentielle trop importante pour être laissé en vie [...] L'adolescent fut trahi, rattrapé et exécuté alors qu'il tentait de s'enfuir en Ethiopie sur les conseils de sa mère. Anthyllus, fils de Marc Antoine et de Fulvie, bien que promis à Julie, la propre fille d'Octavien, connut le même sort." (p.117)

    "Octavien fit son entrée dans Alexandrie en compagnie d'Areios. Le vainqueur se rendit au gymnase qui avait été le théâtre du pseudo-triomphe de Marc Antoine. Monté sur une estrade, il s'adressa en grec aux Alexandrins. Il proclama qu'il leur pardonnait afin d'honorer Sérapis, Alexandre le Grand et Aerios, originaire de la ville. D'ailleurs, Octavien tint à faire ouvrir le sarcophage d'Alexandre, afin de déposer sur sa tête une couronne d'or et de joncher son corps de fleurs. [...] N'était-il pas le premier, depuis Alexandre, à avoir étendu sa domination jusqu'aux limites du monde connu ? Toutefois, il opéra un tri dans l'héritage de cet Orient qu'il venait de conquérir, refusant de voir les tombeaux des rois lagides sous prétexte qu'il avait désiré voir un roi et non des morts. Il refusa aussi d'entrer dans un sanctuaire d'Apis, en affirmant qu'il honorait des dieux et non des boeufs. Actium avait été la victoire des dieux de Rome sur les divinités animales de l'Egypte, ainsi que n'allait pas tarder à l'exprimer Virgile dans l'Enéide. Une divinité syncrétique à moitié grecque comme Sérapis pouvait être adorée par Octavien, mais pas un pur représentant du panthéon vaincu, qui continua à faire l'objet d'une méfiance tenace de la part des autorités romaines." (p.118)

    "Le royaume lagide fut réduit à l'état de province dont Octavien ne voulut pas attribuer le gouvernement à un sénateur, craignant qu'il ne servît de point d'appui à un nouveau concurrent éventuel. C'est la raison pour laquelle il le confia à un simple chevalier portant le titre de préfet, Caius Cornelius Gallus, dont il avait éprouvé l'efficacité pendant cette guerre d'Alexandrie. C'était une façon pour lui de faire de l'Egypte une sorte de domaine personnel, où aucun sénateur ne pouvait se rendre sans autorisation." (p.119)

    "Octavien reçut le 16 avril le droit de porter en permanence le titre d'imperator et le sénat lui accorda la célébration d'un triple triomphe pour ses compagnes d'Illyrie, d'Actium et d'Égypte. Il put aussi donner son nom à une tribu romaine, c'est-à-dire à un collège électoral romain correspondant à une partie du territoire de Rome et votant dans le cadre des comices tributes. Dans le courant de l'été 29, il arriva en Lucanie pour soigner des maux de gorge en compagnie de Mécène et de Virgile qui lui lut ses Géorgiques qui vantaient la prospérité retrouvée de l'Italie." (p.120)

    « Les 14 et 15 août, Octavien fut seul à célébrer ses victoires d’Actium et d’Alexandrie. Conformément à la tradition, Octavien avait revêtu alors les attributs de Jupiter, empruntés dans la garde-robe du temple du Capitole –robe triomphale, spectre, couronne de laurier, qu’un esclave devait tenir au-dessus de sa tête-, et il avait peint son visage au minium. Il était ainsi devenu une sorte de double animé de la statue du dieu, mais l’esclave avait pour mission de lui souffler à l’oreille qu’il restait un homme. Les dépouilles ennemies ouvraient le cortège, suivies des taureaux destinés au sacrifice, d’Alexandre Helios et de Cléopâtre Séléné entravés, du char du triomphateur, de son état-major et enfin des soldats. Une représentant de la déesse Isis […] Contrairement aux usages, les sénateurs suivaient le vainqueur, au lieu de le précéder. Tous les spectateurs purent également constater que le cheval blanc à la gauche de l’attelage du char triomphal était monté par Tibère, fils aîné de Livie âgé de douze ans, tandis que sur celui de droite caracolait Marcellus, fils d’Octavie et neveu d’Octavien. Le jeune Octave avait lui aussi accompagné César lors de son triomphe en 46. […] Les festivités se prolongèrent le 18 août [29] par la dédicace du temple du divin Jules et de la curie Julia –lieu de réunion du sénat- dont la reconstruction avait été entreprise par César. Octavien y fit placer une statue de la Victoire et donna de nombreux jeux et spectacles. » (pp.121-122)

    « Quand au proconsul de Macédoine Marcus Licinius Crassus, petit-fils du malheureux associé de César et du Grand Pompée et fraîchement rallié à Octavien, il obtint le triomphe sur les Bastarnes dont les incursions ravageaient régulièrement la province. Mais il réclama un honneur supplémentaire : les dépouilles opimes, ainsi que le titre d’imperator. Comme il avait tué le roi ennemi Deldon de ses propres mains, il pouvait en effet prétendre dédier dans le temps de Jupiter Feretrius, sur le Capitole à Rome, les armes du vaincu. Or, la tradition ne mentionnait que deux personnages ayant obtenu cet honneur prestigieux depuis Romulus lui-même. Octavien réussit à éviter qu’une telle gloire militaire ne rejaillît sur celui qui aurait pu devenir ainsi un concurrent potentiel. D’après le témoignage de Tite-Live, Octavien aurait invoquée une inscription sur une cuirrasse en lin déposée dans le temple de Jupiter Feretrius par Cornelius Cossus quatre cents ans plus tôt qui lui attribuait le rang de consul. Or, on croyait habituellement qu’il avait reçu les dépouilles opimes en tant que tribun militaire, c’est-à-dire officier. Apocryphe ou authentique, l’inscription du temple de Jupiter Feretrius permettait de réserver cet honneur à ceux qui, combattant sous leurs propres auspices, détenaient ainsi le privilège de solliciter eux-mêmes l’approbation des dieux. Comme Marcus Licinius Crassus avait été consul en 30 et n’était plus que proconsul, Octavien revendiqua sa victoire, sous prétexte qu’elle avait remportée sous ses propres auspices. Quant au vainqueur des Bastarnes, il dut se contenter d’un simple triomphe, dont la célébration fut retardée au mois de juillet 27.
    Cependant, Octavien prit certainement alors conscience qu’il était à la merci d’un proconsul de province un peu trop entreprenant, qu’il ne pourrait pas toujours neutraliser sur la seule base d’arguties juridiques. » (pp.127-128)

    « Le 16 janvier [27], un vote du sénat décerna un certain nombre d’honneurs à Octavien. Une couronne de laurier fut placée au-dessus de la porte de sa maison sur le Palatin, en remerciement d’avoir sauvé la vie de citoyens romains, et un bouclier d’or accroché à la curie portant inscrit le nom de ses vertus : la clémence, le courage, la justice et la piété. Emportés par leur élan, certains sénateurs auraient été prêts à lui attribuer le surnom de Romulus, pour faire du fils du divin Jules un nouveau fondateur de Rome. Mais Romulus en avait aussi été le premier roi et le responsable de la première lutte fratricide avec le meurtre de Rémus. Un tel surnom n’apparaissait donc guère compatible avec la république et la paix qu’Octavien était censé avoir restaurées. Lucius Munatius Plancus, qui cherchait peut-être à faire oublier qu’il avait soutenu Marc Antoine jusqu’à la veille de la bataille d’Actium, proposa de lui décerner le surnom d’ « auguste ». Chacun de ses actes serait désormais investi d’un surcroît de charisme et d’efficacité. Il dut mettre un frein à certaines manifestations exagérées de dévotion qui auraient pu se retourner contre lui, comme elles avaient été fatales à César. Mais il ne put empêcher un des tribuns de la plèbe nommé Sextus Pacuvius ou Ampudius d’appeler le sénat et la population de Rome à se dévouer à Auguste à la façon des Ibères et à lui offrir des sacrifices. » (pp.132-133)

    « Caractère très superstitieux d’Auguste […] enracinées dans les traditions de ces petites cités du Latium dont [sa famille] était originaire. » (p.139)

    « Il avait également entrepris la construction d’un Temple voué à Apollon [sur le Palatin, la même colline où se trouvait la résidence d’Auguste]. [Transfert en 28 par Auguste dans Livres sibyllins] » (p.141)

    « Auguste pouvait se prévaloir du voisinage de Romulus, le héros fondateur dont la cabane était située selon la tradition dans les parages immédiats de sa propre demeure. » (p.142)

    « Le décret du sénat du 16 janvier 27 qui avait décerné la couronne civique de laurier à Auguste lui avait aussi accordé le droit d’orner la façade de sa demeure d’un fronton, comme s’il s’agissait d’un temple. » (p.143)

    « La convocation de plus en plus fréquente [du Sénat] sur le Palatin plutôt que dans la curie du Forum manifestait clairement la prééminence du prince sur la conduite des affaires. D’ailleurs, Auguste interdit de publier les comptes rendus des débats du sénat, alors que César avait rendu cette diffusion obligatoire lors de son premier consulat en 59. Le dictateur avait voulu ainsi placer les sénateurs sous le contrôle de la plèbe urbaine. En restaurant la confidentialité des séances, Auguste s’écartait de cet héritage populaire et faisait du secret l’un des instruments de son pouvoir personnel. Il est vraisemblable que les sénateurs se réunissaient alors dans la bibliothèque latine attenante au temple d’Apollon, ornée de portraits d’auteurs anciens et de grands hommes : Auguste lui-même y figurait en Apollon… » (p.145)

    « On vit également passer à Tarraco des Parthes et des Grecs de Mitylène. Ceux-ci venaient lire au prince un décret lui dédiant un temple et lui consacrant jeux et sacrifices, tout comme ils en offraient à Zeus. Auguste accepta ces honneurs divins et aussi ceux que lui décernèrent les habitants de Tarraco, sous la forme d’un autel. Il était en effet moins dangereux d’être assimilé à un dieu de son vivant en province qu’à Rome, où le sénat aurait regardé avec suspicion toute manifestation trop ostentatoire de vénération. Les témoignages de cette vénération de la personne du prince furent particulièrement nombreux dans l’Orient romain, mais Auguste voulut toujours y être associé à la déesse Rome.
    Avant le milieu de l’année 24, Auguste rentra à Rome. » (p.152)

    « Agrippa construisit un nouveau temple, à partir de 27. […] La substitution, au cœur du sanctuaire, des statues de Mars, Vénus et César divinisé à la triade capitoline traditionnelle Jupiter, Junon et Minerve le vouait plus particulièrement à l’exaltation des dieux tutélaires de la famille des Jules, à laquelle appartenait Auguste depuis son adoption par son grand-oncle. D’ailleurs cette vocation dynastique était encore plus clairement affirmée par la présence, de part et d’autre de l’entrée, des statues du prince lui-même et d’Agrippa. Ce dernier aurait même eu l’intention de donner à ce temple le nom d’Augusteum. Mais le prince, qui venait d’accepter de recevoir des honneurs divins en province, les refusa à Rome. Il voulait continuer à y apparaître comme le restaurateur de la république. » (pp.155-156)

    « Il avait d’ailleurs pris soin de partager le consulat –qu’il exerçait sans interruption depuis 31- avec des personnalités choisies de manière à respecter un certain équilibre politique. » (pp.156-157)

    « La restauration proclamée de la république s’avérait incompatible avec la fondation d’une dynastie et l’instauration d’un pouvoir héréditaire ouvertement monarchique. » (p.157)

    « Devenu le genre du prince [en épousant sa fille Livie], Marcellus obtint le pontificat, l’édilité pour 23, le droit de siéger au sénat parmi les anciens préteurs et celui de briguer le consulat dix ans avant l’âge légal. » (p.158)

    « Quand Auguste se sentit au plus mal, au début de l’année 23, c’est finalement à Agrippa qu’il choisit de remettre son sceau en présence des magistrats, des principaux sénateurs et chevaliers. » (p.158)

    « En juin de cette même année 23, Auguste abdiqua le consulat qu’il monopolisait depuis huit ans. […] Son successeur, Lucius Sestius Albinus, se voulait un authentique républicain qui vouait ouvertement un culte à la mémoire de Brutus. […] Il perdait son droit de réunir le sénat et le peuple et il lui fallait trouver un moyen institutionnel de conserver ce pouvoir capital. La solution consista alors à lui conférer une puissance tribunicienne. […] Il se fit accorder le 26 juin 23, sous le nom de puissance tribunicienne, l’ensemble des attributions des tribuns de la plèbe qui complétait désormais parfaitement, dans le domaine civil, les pouvoirs militaires que lui conférerait l’imperium sur ses provinces. Cette puissance tribunicienne d’Auguste était même supérieure aux prérogatives des tribuns de la plèbe dans la mesure où elle n’était limitée par aucune restriction spatiale ni aucun droit de veto. Dans la foulée, il se vit reconnaître le pouvoir de conserver son imperium en rentrant à Rome et Agrippa fut doté d’un imperium sur les provinces qu’il partit inspecter au mois de juillet. » (pp.161-162)

    « Marcellus fut […] le premier membre de la famille impériale à reposer dans le mausolée monumental édifié par Auguste sur le Champ de Mars, après des funérailles princières où le prince lui-même prononça son éloge funèbre. » (p.163)

    « Celui-ci n’avait-il pas décidé de faire procéder à des sacrifices après la découverte de la conjuration comme s’il s’était agi d’une grande victoire remportée sur les pires ennemis de Rome ? » (p.168)

    « Puisque l’élection d’un préfet de la Ville à l’occasion des Féries latines avait provoqué des troubles, Agrippa décida [en 21 av. J.C.] de suspendre cette procédure pendant un an. Il réitéra également l’interdiction –déjà édictée en 28- de célébrer des cultes égyptiens à l’intérieur du pomerium et dans un rayon de quatre stades au-delà. C’était une manière de leur faire porter une part de responsabilité dans les troubles qui agitaient la Ville. On sait d’ailleurs combien l’argument de la menace orientale avait régulièrement été exploité par Octave. Cependant, ces prohibitions répétées témoignaient aussi de l’influence croissante des cultes étrangers à Rome. » (p.170)

    « [Phraate] restitua aux Romains les enseignes et les prisonniers survivants de l’armée de Crassus battue à Carrhes. […] Les enseignes militaires –notamment les aigles légionnaires- faisaient l’objet d’un culte. […] Des monnaies furent frappés, un arc élevé sur le Forum et un petit temple circulaire dédié à Mars sur le Capitole pour y déposer les enseignes restituées. » (p.174)

    « Le prince profita également de son séjour en Grèce pour se faire initier aux mystères d’Eleusis. » (p.175)

    « Le prince attendait beaucoup de l’Enéide, cette épopée qui devait chanter la vocation de Rome à dominer le monde et la destinée providentielle de la gens Julia depuis Enée, qui trouvait son aboutissement dans le principat d’Auguste. Le poète se trouvait justement en Grèce pour y trouver l’inspiration nécessaire à l’achèvement de son œuvre. Le soleil trop ardent de Mégare lui aurait été fatal, et il mourut en touchant le sol de l’Italie à Brindes. Estimant son poème inachevé et imparfait, il aurait voulu le détruire avant sa mort, mais Auguste était fermement résolu à préserver ce manuscrit qui servait si bien sa gloire au moment où il s’apprêtait à rentrer dans Rome. » (pp.175-176)

    « En 19, le prince reçut le pouvoir d’agir comme un censeur sans en porter le titre. » (p.178)

    « Il entreprit alors de dissoudre entièrement le sénat, en ne conservant qu’un comité restreint de trente sénateurs […] Le prince du finalement se résoudre à désigner d’autorité certains sénateurs et accepter de porter leur nombre total à six cents au lieu de le limiter à trois cents, ce qui correspondait à l’effectif antérieur à la dictature de Sylla, au début du Ier siècle avant notre ère. » (p.179)

    « Une autre Lex Julia dite de adulteriis réprimait très sévèrement l’adultère en frappant d’exil la femme infidèle et son complice, mais aussi en contraignant l’époux ou le père de celle-ci à la dénoncer. Cet ordre moral qu’Auguste prétendait restaurer suscita les sarcasmes de certains sénateurs qui ne manquèrent pas de pointer les contradictions entre les paroles du prince et son propre comportement. Celui-ci se déroba maladroitement aux allusions à sa vie privée en reprenant le discours mysogine d’un censeur du IIe siècle av. J.C., Quintus Metellus. » (p.181)

    « La multiplication des affranchissements augmentait d’autant le nombre des citoyens, même si les affranchis ne détenaient pas tous les droits des citoyens nés libres, les ingénus. Les affranchis demeurant attachés à leur ancien maître par des liens de clientèle qui en faisaient leur patron, ils pouvaient constituer une faction politique toute dévouée aux intérêts de celui-ci. […] On comprend qu’Auguste ait ressenti la nécessité de mieux réglementer la pratique des affranchissements, toujours avec le souci de réaffirmer les hiérarchies sociales. […] Le nombre d’affranchissements simultanés auxquels un propriétaire pouvait procéder ne put dépasser un pourcentage déterminé des effectifs en sa possession. Les maîtres concernés devaient avoir plus de vingt ans et les esclaves affranchis plus de trente. » (pp.186-187)

    « Horace, promu chantre officiel du régime depuis la mort de Virgile. » (p.191)

    « [Auguste, contrairement à César] était parfaitement conscient de l’importance prise par les spectacles dans la vie de la plèbe urbaine. Il savait qu’elle attendait de lui qu’il partageât cette passion et il répondit toujours à cette attente quel que soit l’intérêt réel qu’il éprouvait pour ces manifestations. […] Le prince n’acceptait pas non plus de voir l’aristocratie romaine déroger en participant elle-même aux spectacles. » (p.191)
    -Pierre Cosme, Auguste, Perrin, coll. Tempus, 2009 (2005 pour la première édition), 345 pages.





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